Une direction empathique engendre un meilleur service

Dans la révolution actuelle des communications, l’empathie pose une vraie question. Pour communiquer avec leur équipe et leurs clients, les dirigeants doivent activer des qualités personnelles telles que l’écoute.

La montre que vous portez pour compter le nombre de pas que vous effectuez quotidiennement vous dit que vous ne bougez pas assez. Et l’application mobile de votre banque vient de sonner, votre solde est plus faible que d’habitude. Tout à coup, la caméra de sécurité s’allume devant chez vous ; il ne s’agissait heureusement que d’une livraison Amazon à proximité du détecteur. 

Ce qu’on appelle la quatrième révolution industrielle, qui mêle technologies établies et émergentes, est en route. S’ils sont pratiques et novateurs, ces développements commencent aussi à nous submerger, si l’on compte les réunions quotidiennes sur Zoom, les films sur Netflix et les navigations Twitter qui occupent une bonne part de nos journées. Plus important, ils peuvent générer un certain stress.

Plus de 7 milliards d’appareils connectés (IoT – Internet of Things) sont en activité à travers le monde. Toutes sortes de services sont déjà automatisés. Bientôt, votre maison, votre bureau et votre ville utiliseront des données et des algorithmes en temps réel pour prendre des décisions « intelligentes ».  Une étude de PwC indiquait que 90 % des consommateurs américains utilisaient déjà régulièrement au moins une technologie de cette révolution. Et le nombre continue de grimper. 

Si près de trois quarts des consommateurs américains disent prévoir d’utiliser des montres intelligentes ou des applications de suivi de fitness dans l’année à venir, seulement 63 % d’entre eux ajoutent qu’ils savent s’en servir. Ce n’est pas vraiment surprenant. Ce genre de statistiques illustre les peurs émergentes quant à la rapidité du changement, même chez ceux qui adoptent volontairement ces nouvelles technologies. Ces craintes vont de la protection des données personnelles à la possibilité d’une perte d’emploi liée à l’automatisation. Kai-Fu Lee, auteur d’AI Superpowers, prédit que près de la moitié des effectifs mondiaux sera affectée par les technologies intelligentes dans les 15 ans à venir.

Alors que la croissance et les perturbations technologiques deviennent quotidiennes dans tous les secteurs, les craintes économiques et professionnelles, ainsi que personnelles, sont plus nombreuses que jamais. Quand l’avenir est incertain, les dirigeants ne sont pas toujours en mesure de fournir des réponses concrètes. Ils peuvent cependant offrir leur empathie. Être capable de ralentir, d’écouter et de répondre aux besoins humains des personnes qui vous entourent s’avérera bénéfique à vos employés, mais aussi à vos clients.

Gérer l’humain dans son intégralité

Le rôle d’un responsable est de favoriser un environnement motivant et de diriger vers des actions positives. En plus d’indiquer une voie claire vers un objectif, il s’agit de faire preuve de compassion, de prouver une raison d’être, de démontrer le bien-fondé d’un jugement et, plus important encore, de s’assurer que chaque employé se sente considéré.

Une étude Google a cherché à définir les points les plus importants au sein des équipes les plus efficaces. Le point essentiel du « Project Aristotle », en référence à la maxime du philosophe grec (« Le tout est plus que la somme de ses parties »), c’est que les groupes dans lesquels s’exprimaient des qualités humaines comme l’empathie et l’intelligence émotionnelle surpassaient ceux composés de personnes avec une expertise plus technique.

« Tant que chacun a la possibilité de s’exprimer, l’équipe se porte bien, » commente Anita Woolley, principale auteure de l’étude. « Mais, si une seule personne ou un groupe restreint monopolise la parole, l’intelligence collective décline. »

Etablir un lien avec une personne ne signifie pas effacer toutes limites interpersonnelles, mais il s’agit d’apprendre à lire les signaux et d’ajuster les limites de chacun. C’est parfois aussi simple que prouver sa volonté d’être à l’écoute. Un collaborateur peut tout partager de sa vie personnelle, tandis qu’un autre préfère protéger son intimité. L’un redoute une nouvelle technologie qui risque de rendre son rôle obsolète, tandis qu’un autre se réjouit de voir grandir l’équipe. Un bon dirigeant sait identifier les caractères et répondre en fonction. Traiter tout le monde avec équité n’est pas traiter tout le monde de la même façon.

Le leadership situationnel développé par Paul Hersey et Ken Blanchard en 1982 ouvrait la voie à un management empathique. Les auteurs ont réparti les employés en quatre catégories, selon leurs aptitudes et leur volonté à contribuer à une cause : inaptes et réticents, inaptes mais volontaires, aptes mais réticent, aptes et volontaires. En se basant toujours sur le contexte, les dirigeants sont chargés de classer leurs collaborateurs dans l’une de ces catégories.

Lorsque votre entreprise adopte un nouveau logiciel de management, un collaborateur de 25 ans (apte et volontaire) pourra s’adapter sans mal. Un collaborateur plus âgé nécessitera peut-être plus de temps (volontaire mais temporairement inapte). Dans un autre contexte, ces mêmes personnes pourraient avoir des rôles inversés. Si on le charge de diriger un projet et une équipe, ce collaborateur de 25 ans pourrait montrer son inexpérience (inapte mais volontaire), tandis que le collaborateur plus âgé (apte et volontaire) guidera le projet sans heurt jusqu’à son objectif.

Le point à retenir ici, c’est que chaque collaborateur perçoit différemment une même situation. Leurs raisons peuvent aller de leur poste à leur niveau d’expérience personnelle et professionnelle. Appréhender les attitudes et perspectives d’un collaborateur est essentiel pour s’assurer de prendre les bonnes décisions, dans l’intérêt de tous. L’acceptation ou la crainte suscitée par un changement dépend de la capacité du dirigeant à contextualiser ce moment pour la personne avec laquelle il s’entretient.

Diriger n’est au final pas une question de délégation de tâches, mais bien de gestion des relations.

Le passage d’une vision transactionnelle à une relation plus holistique a changé beaucoup de choses pour de nombreuses entreprises établies, depuis quelques années. Le fait ne peut plus être ignoré.

Appliquer cette méthode aux clients

En 2014, la compagnie aérienne low-cost RyanAir modifiait plusieurs de ses politiques suite aux plaintes de ses clients : allègement des restrictions sur les bagages, suppression des frais cachés et application de sièges dédiés. Alors que les précédentes politiques étaient conçues pour réduire les coûts (et donc augmenter les profits), RyanAir découvrait l’évidence : donner aux passagers ce qu’ils voulaient était encore plus profitable. Les profits allaient grimper de 30 % dans l’année, la compagnie ayant cessé de prendre des décisions en restant penchée sur des tableaux et des algorithmes. L’entreprise commençait à réfléchir comme ses clients. 

Si j’avais su qu’être gentil avec les clients allait si bien marcher, j’aurais commencé il y a des années. – PDG, Michael O’Leary

S’ils sont loin d’être les seules autorités sur l’empathie ou le management, Hersey et Blanchard arguaient que les individus sont différents et doivent donc être traités comme tels. Une évidence, aujourd’hui. Le même mode de pensée s’applique aux clients et prend une autre dimension avec l’arrivée de la quatrième révolution. 

Avec l’explosion des outils de communication numériques, messagerie, vidéo, VR, etc., il est indéniable qu’un fossé s’est creusé entre les entreprises et leurs clients. Pour toucher leurs consommateurs à travers ces couches et canaux numériques, les sociétés doivent s’appuyer sur un groupe de technologies qui relie les éléments disparates, puis sur un second qui les aide à traiter les données reçues. Cela s’apparente à un jeu de téléphone arabe sur la planète entière.

C’est un réconfort immense de voir les innovations apprendre et s’adapter aux désirs du client. En théorie, cette aptitude devrait permettre aux entreprises de proposer de meilleurs produits et services. Mais, même si les sociétés dépensent des millions de dollars sur une technologie de coordination, collaboration et communication sur plusieurs écosystèmes numériques, il demeure un besoin prégnant d’instiller un peu d’humanité dans le processus. Et aucun guide n’existe en la matière.

Le besoin d’échanger est très humain. La technologie facilite la collaboration, mais celle-ci nécessite une touche d’humanité. Quand les dirigeants aspirent à davantage qu’un simple lien entre leurs clients et leur entreprise ou qu’ils souhaitent offrir à leurs collaborateurs des outils à distance, ils peuvent prendre un peu de recul et envisager de nouvelles situations dans un contexte plus engagé et traiter les problèmes de façon plus efficace qu’aucun algorithme.

Les entreprises empathiques sont prêtes à rencontrer leurs interlocuteurs, où qu’ils se trouvent. En retour, les clients comme les collaborateurs leur renvoient soutien et fidélité. En pratique, cela s’apparente à de la loyauté. Durant la crise du COVID-19, de nombreux restaurants se sont tournés vers la livraison. En retour, les clients les ont soutenus en passant commande. Le géant américain des télécommunications Verizon a fourni du matériel aux enfants coincés chez eux avec leurs devoirs, en plus de données gratuites. Les abonnés l’ont remercié en renouvelant leur fidélité. Ce sont de bons indicateurs d’une entreprise empathique. 

La technologie mal utilisée peut obscurcir le lien entre entreprises et clients, mais elle offre aussi des outils aux dirigeants pour mieux comprendre et servir leur clientèle avec empathie. Tout est une question de perspective.

Cet article est initialement paru sur thecxreview.comdécouvrez-y de nombreux autres sujets passionnants sur le service client du futur.